Dans les heures qui suivent la parution de notre article sur l’annulation par Sciences Po d’une conférence prévue de longue date par le dalaï-lama, les étudiants de la grande école échangent des messages consternés.
Nous sommes choqués par le manque de transparence et d’honnêteté de Sciences Po
« Nous étions stupéfaits », raconte Mateï Ngangue, 19 ans, étudiant de deuxième année : « On savait depuis juillet par un tweet de la direction que le dalaï-lama allait donner une conférence publique chez nous, que les étudiants pourraient y assister. On était ravis de pouvoir l’entendre en direct. Et soudain, on apprend par la presse que cet événement a été annulé, qui plus est pour des raisons très peu plausibles. Cette histoire d’annulation pour cause de doublon dans l’emploi du temps d’un groupe d’élèves n’est pas sérieuse. Nous sommes choqués par le manque de transparence et d’honnêteté de Sciences Po. »
Pour les amis de Mateï, le dalaï-lama est un personnage universellement respecté pour sa défense des valeurs de dialogue et de paix. Le fait qu’il soit une sommité dans le monde du bouddhisme n’est pas ce qui compte le plus à leurs yeux. Mateï précise qu’il est lui-même catholique et que son intérêt pour le dalaï-lama n’est pas d’ordre religieux : « Beaucoup d’étudiants de ma promotion voulaient l’entendre parler de ses grands principes, comme celui de la lutte non violente face à la politique chinoise d’envahissement et de destruction culturelle. Cet homme est à lui seul une école d’ouverture et de réflexion. Et nous avons tout à gagner à entendre sa pensée. »
Une action et une pétition
Des messages indignés s’échangent sur Facebook. L’idée surgit spontanément d’un sit-in pour protester contre cette annulation. La page créée sur Facebook pour l’événement enregistre déjà de nombreux participants. Une date est fixée : lundi 19 septembre à 12 h 15, devant le portail du prestigieux établissement, 27 rue Saint-Guillaume.
Sciences Po doit comprendre que nous tenons au principe de liberté d’expression
« Lundi, le dalaï-lama aura sans doute quitté la France, et il sera trop tard pour annuler l’annulation », reconnaît Mateï. « Mais le but de notre mouvement est d’éveiller les consciences, d’empêcher que de telles choses se reproduisent à l’avenir. Sciences Po doit comprendre que nous tenons au principe de liberté d’expression, que nous sommes opposés à la censure. Et qu’on ne peut nous endormir avec des histoires peu crédibles. »
En attendant le sit-in de lundi prochain, Mateï est en train de rédiger une pétition contre l’autocensure à laquelle les institutions les plus prestigieuses ont malheureusement tendance à se livrer. Elle sera publiée sur change.org.
Parution site de l’Obs 15 septembre 2016