Pour la liberté, pour le droit d’étudier leur langue et de pratiquer leur religion, ils sont déjà trente à s’être immolés. Aux yeux de la Chine, ils ne sont que des « terroristes ». Reportage au pays interdit

L’autel dédié à Sonam, trentième Tibétain à s’être immolé par le feu

L’autel dédié à Sonam, trentième Tibétain à s’être immolé par le feu

Sous de grands portraits souriants du dalaï-lama suspendus aux murs, un autel improvisé occupe tout le fond de la véranda. La foule compacte qui s’entasse dans l’espace exigu observe un silence impressionnant. Brillant de ferveur et de fierté, les regards sont fixés sur une petite photo posée sur un tas d’écharpes cérémonielles : chemise blanche boutonnée, raie sage sur le côté, l’air timide, un frêle visage s’offre aux nombreux visiteurs accourus des quatre coins du haut plateau.

Habillés de leurs plus beaux brocards, ils viennent en procession vers le hameau de Shabrang, perdu dans un vaste paysage au bout d’une mauvaise route de terre. Ils grimpent le chemin boueux entre les murs de terre crue et des toits de chaume et vont déposer avec déférence leurs cadeaux au pied de l’autel – du thé en briques, des sacs de céréales, des mottes de beurre… La personne chargée des offrandes prend note des dons en espèces, des sommes importantes eu égard à la pauvreté de la région. Puis les visiteurs se plantent devant la modeste effigie de Sonam Dargye, et récitent des prières en l’honneur du petit paysan devenu héros du peuple.

Nous voulons le retour de Sa Sainteté le dalaï-lama !

Sonam est en effet le trentième Tibétain à s’être immolé par le feu. Contrairement à la plupart de ceux qui l’ont précédé, il n’était pas un moine, mais un campagnard illettré qui n’a pu envoyer aucun de ses quatre enfants à l’école. À 44 ans, il avait des soucis normaux, comme cette maison à construire pour son aîné en âge de se marier. Pour payer les travaux, il confectionnait des moulins à prières au monastère de Rongwo, dans la ville voisine de Rebkong.

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Tout bascule le 17 mars. Sonam se prosterne devant le portrait du dalaï-lama. Puis il boit de l’essence. Au pied du monastère, il s’enflamme comme une torche en criant : « Nous voulons le retour de Sa Sainteté le dalaï-lama ! ». Pour empêcher les policiers de s’emparer de lui, il a pris soin d’enrouler son torse de coton imbibé d’essence et de fil de fer barbelé. Un employé qui passait par là a filmé la scène avec son téléphone portable. Il montre des images très dures de Sonam essayant encore de lever le poing – comme le font tous les immolés – alors qu’il est déjà entièrement la proie des flammes.

Funérailles de Sonam Dargye à Rebkong

Funérailles de Sonam Dargye à Rebkong

Bouleversés, des passants portent le cadavre calciné sur l’esplanade du monastère – là où, trois jours plus tôt, le 14 mars, un ami de Sonam, le moine Jamyang Palden, avait accompli le même geste radical.

Les policiers sont arrivés en force pour nous disperser, mais nous étions tellement plus nombreux qu’ils ont renoncé

Rebkong est sous le choc. Contrairement à la province voisine du Sichuan où les incidents de ce genre se succèdent depuis un an, la ville n’en a connu aucun avant ce 14 mars, date anniversaire du soulèvement de Lhassa en 2008. « L’esplanade s’est remplie en un clin d’œil, raconte l’employé. Les policiers sont arrivés en force pour nous disperser, mais nous étions tellement plus nombreux qu’ils ont renoncé. Ce sont des moines âgés qui ont maintenu l’ordre. Ils ont fait des funérailles publiques solennelles, puis tout le monde est monté sur la colline pour assister à la crémation. Les gens étaient tellement émus… ». Selon des témoins, la foule aurait atteint 8 000 personnes – la plus importante concentration jamais enregistrée dans cette ville de 80 000 habitants.

Excusez-nous, ce sont des choses dont on ne peut pas parler…

Pourquoi Sonam Dargye a-t-il accompli un geste aussi extrême ? Était-ce par colère ? Par défi ? Par désespoir ? Par imitation ? Dans la modeste maison de Shabrang, la question reste sans réponse. L’épouse, Dolkar Kyi, souffre de problèmes cardiaques depuis l’événement. Accroupie sur l’estrade qui lui sert de lit dans sa minuscule chambre, un goutte-à-goutte fiché dans le poignet, elle a à peine la force de saluer le flot de visiteurs. Quant aux enfants, dont le plus jeune a 6 ans, ils ne parlent que le patois. C’est un parent, un énergique quadragénaire, qui répond aux questions – en évitant tout propos problématique. « Mon cousin était pauvre, mais l’argent n’était pas un souci pour lui, affirme-t-il. Il était très pieux, et faisait souvent des pèlerinages ». Selon lui, personne ne peut décrire l’état d’esprit de Sonam, personne n’ayant eu connaissance de son projet. Quant à exprimer ce que ressentent les proches – approbation, fierté, etc. – il reste encore plus évasif : « Excusez-nous, ce sont des choses dont on ne peut pas parler »…

Dolkar Gyi, épouse de Sonam Dargye, à Shabrang

Dolkar Gyi, épouse de Sonam Dargye, à Shabrang

Pour Pékin, confronté à un mode de contestation aussi inédit que radical, les immolés sont purement et simplement des « terroristes » manipulés par l’étranger. Peu importe le soin qu’ils prennent à ne nuire à personne. Tous leurs proches risquent d’être tenus pour complices. Dans les localités tibétaines du Sichuan, dirigées par des durs qui continuent à appliquer des méthodes dignes de la révolution culturelle, les survivants sont traités comme des criminels. À Aba, théâtre de la moitié des cas d’immolation, chaque incident est suivi d’arrestations, ce qui entraîne de nouvelles immolations. Un cercle vicieux, qui ne présage que des lendemains terrifiants.

Ce qu’on veut ? La liberté. On n’est pas libres

Même inquiétude à Tongde, à 200 km de Rebkong, où la police a réagi le 16 mars à une manifestation rassemblant un millier de personnes, en jetant des grenades au milieu de la foule. Impossible de connaître les détails de l’incident. Mais il y aurait plusieurs blessés, selon un jeune moine rencontré dans un monastère proche de la ville. « Nous avons nous aussi protesté près d’ici. Ce qu’on veut ? La liberté. On n’est pas libres. On ne peut pas pratiquer notre religion librement. On ne peut pas rencontrer notre chef spirituel. On ne peut pas étudier notre langue dans les écoles, ils basculent tous les cours vers le chinois. On ne peut même pas s’immoler sans mettre en danger sa famille ou son monastère… » Le jeune homme redoute que la province du Qinghai n’applique des politiques restrictives rodées ailleurs : « À Lhassa, un monastère ne peut avoir plus de 30 moines, là où jadis on en comptait des milliers ! Ils veulent tuer à petit feu le système monastique qui est un pilier de notre existence… »

Ils ont en fait décidé de nous éradiquer en tant que peuple

À Rebkong, dont le secrétaire du Parti pratique une approche plus souple fondée sur le dialogue avec les hauts lamas, l’explosion de violence a été évitée malgré l’immense émotion déclenchée par les deux sacrifices de mars. « C’est vrai, ils sont moins féroces ici, reconnaît un enseignant. Mais regardez ce qui se passe : la langue tibétaine est battue en brèche dans nos propres écoles, on est noyés de migrants chinois. Ils ont en fait décidé de nous éradiquer en tant que peuple. Ce qui suffit à expliquer le geste des immolés ».

Les parents de Sonam Dargye et ses frères et sœurs à Shabrang

Les parents de Sonam Dargye et ses frères et sœurs à Shabrang

Face à la prolifération des candidats au martyre, Pékin veut étouffer la révolte en tuant l’information dans l’œuf. Le pouvoir a scellé l’espace tibétain, grand comme quatre fois la France et dispersé sur quatre provinces. Un cordon de barrages installés à des centaines de kilomètres en amont des lieux sensibles intercepte les journalistes étrangers. Quant à la presse chinoise, elle est sommée de reprendre les dépêches de l’agence Chine nouvelle. Internet est coupé sur le plateau, les téléphones portables sont écoutés. Quand on parle à un Tibétain, il prend la précaution non seulement d’éteindre son téléphone, mais de retirer la batterie…

C’est la seule forme de protestation qui nous reste : nous ne pouvons ni manifester, ni chanter, ni écrire, ni débattre sur les forums…

Le Tibet est écrasé sous une véritable loi martiale qui ne dit pas son nom. Au Sichuan, les districts tibétains dépensent pour le maintien de l’ordre de quatre à six fois plus que les districts non tibétains. Le nombre de militaires envoyés dans la région monte en flèche, laissant présager une répression armée. Mais rien ne semble à même de stopper la contagion sacrificielle. « Je suis persuadé que le mouvement va continuer, et même toucher de nouvelles catégories : des profs, des fonctionnaires… » prédit Tashi (le nom a été changé) un écrivain qui vit à Xining, la capitale provinciale. « C’est la seule forme de protestation qui nous reste : nous ne pouvons ni manifester, ni chanter, ni écrire, ni débattre sur les forums… 70 intellectuels et artistes sont en prison. » Les immolations sont donc à comprendre non comme des actes de désespoir, mais au contraire comme des actes de combat. « Depuis le soulèvement de 2008, les Tibétains ont compris que la liberté a un prix, qu’elle ne nous sera pas offerte », continue Tashi. Dans ce cas, pourquoi pas une révolte ouverte ? « À cause du dalaï-lama. Les gens veulent par-dessus tout son retour. Comment pourraient-ils utiliser des méthodes qu’il désapprouve ? »

Je suis persuadé que nous finirons par gagner, parce que la force morale gagne toujours contre la force physique

Jusqu’où ira l’hécatombe ? Tashi se rembrunit : « Au début on disait : à 15, l’ONU va intervenir. Puis on a dit 20. Nous en sommes à 30, et il ne se passe rien… Maintenant, les gens parlent de 2 000 sacrifices, dit-il avec un frisson, un chiffre qu’on prétend tiré de l’histoire de la lutte de Gandhi contre les Anglais… »

Malgré l’aggravation de la répression, les Tibétains semblent pourtant étonnamment optimistes. « Bien sûr ! Je le suis aussi, déclare Tashi avec passion. J’avoue avoir longtemps cru que nous n’avions aucune chance face à la Chine… Et puis il y a eu le soulèvement de 2008 : et on a vu que nous étions un peuple exceptionnel, prêt à mourir pour la liberté, pour la justice. Tous ces immolés sont des héros qui nous donnent une force extraordinaire. Je suis persuadé que nous finirons par gagner, parce que la force morale gagne toujours contre la force physique ».

33 Tibétains se sont immolés en Chine, dont une vingtaine depuis le début 2012. La plupart sont de jeunes moines du district d’Aba, dans le Sichuan. Mais le mouvement s’est étendu à des nonnes, à un lama réincarné et à des laïcs, et se propage à d’autres régions tibétaines.

Zhu Weiqun, patron du Front Uni, organisme du Parti communiste chinois chargé du « dialogue » avec le dalaï-lama, veut renforcer le « nationalisme chinois » en abolissant le caractère « multiethnique » de l’État chinois. Il faut selon lui éliminer toute référence aux minorités ethniques et à leurs territoires, ainsi que les droits spéciaux comme celui d’être éduqué dans la langue de l’ethnie minoritaire.


L’agence Chine nouvelle traite le dalaï-lama de « nazi » : son projet d’autonomie pour le Tibet, qui prévoit de limiter l’immigration han, rappelle « l’Holocauste commis par Hitler contre les Juifs ». Le Centre Simon Wiesenthal exige des excuses pour « la double diffamation » faite aux victimes de l’Holocauste et à un leader spirituel qui « a toujours défendu des valeurs que les nazis ont cherché à détruire ».

Parution Le Nouvel Observateur 29 mars 2012 — N° 2473


Version en anglais dans Wordcrunch

TIBET: HOW MANY MORE SACRIFICES?

Journalist Ursula Gauthier managed to get past Chinese roadblocks to get into Tibet, where she met the families and friends of those who have sacrificed themselves by immolation to protest against Chinese rule.

QINGHAI – At the end of the veranda, below the big, smiling portraits of the Dalai Lama hanging on the walls, an altar has been created. The crowd, squeezed together in the confined space, is absolutely silent. Glowing with fervor and pride, their gazes are fixed on a small photo which has been placed on the altar on top of a pile of ceremonial scarves: dressed in a white buttoned-up shirt, hair sensibly parted to the side, a delicate face looks timidly out at the visitors who have come from all over  the Tibetan highlands.

Dressed in their Sunday best, the procession weaves its way along the dirt track to Shabrang, a tiny hamlet lost in the middle of this endless landscape. They climb the muddy track between the mud brick walls and thatched roofs, before placing their presents at the foot of the altar with reverence. Bricks of tea, bags of grain, slabs of butter… the person in charge of the offerings makes a note when money is given. These are very generous offerings, given the poverty of the region. The visitors then join the rest of the crowd assembled in front of the modest altar dedicated to Sonam Dargye and recite prayers in honor of this peasant who has become the people’s hero.

Sonam is the thirtieth Tibetan to set himself on fire. Unlike most of those who went before him, he was not a monk but an illiterate peasant who couldn’t afford to send his four children to school. At 44 years old, he had normal worries, such as how he was going to build a house for his eldest son who was ready to get married. To pay for the construction, he made prayer wheels at the Rongwo monastery in the neighboring town of Rebkong.

And then, on March 17, everything changed. Sonam knelt in front of a portrait of the Dalai Lama, before drinking petrol. At the foot of the monastery, he set fire to himself while crying out: “We want His Holiness the Dalai Lama back!” To prevent policemen seizing hold of him, he had wrapped his torso in petrol-soaked cotton and barbed wire. A worker who was passing by filmed the whole scene on his mobile phone. The video is hard to watch: it shows Soman trying to lift his fist – as the other fire matyrs have done – while the fire consumes him.

In shock, passers-by carried his charred body to the main square of the monastery which is where, three days earlier on March 14, a friend of Sonam’s, the monk Jamyang Palden, had carried out the same radical act.

Martyrs or « terrorists »?

Rebkong is still in shock. Unlike the neighboring province of Sichuan, where this type of incident has been happening for over a year, Rebkong had not experienced an immolation until March 14, 2012, the anniversary of the uprising of Lhasa in 2008. “The main square filled up in the blink of an eye,” recalls a worker. “A large contingent of police arrived, but there were so many of us that they gave up. It was the elderly monks who kept things under control. They performed a solemn public funeral, and then everyone climbed to the top of the hill to attend the cremation. People were so moved…” According to witnesses, the crowd swelled to 8,000 people – the biggest gathering ever seen in this town of 80,000 inhabitants.

Why did Soman Dargye carry out such a radical act? Was it in anger? Provocation? Desperation? In his modest house in Shabrang, the question remains unanswered. His wife, Dolkar Kyi, has been suffering from cardiac problems since the incident. Squatting on the platform which serves as her bed, a drip in her wrist, she barely has the strength to greet the flood of visitors. Her four children – the youngest is 6 years old – only speak the local dialect. It is a relative, an energetic 50-year-old, who answers people’s questions, whilst avoiding anything that could be vaguely problematic. “My cousin was poor, but money was not a concern for him,” he said. “He was very pious and often went on pilgrimages.” According to him, nobody can describe Sonam’s state of mind, as nobody knew of his plan. When it comes to expressing what Sonam’s relatives are feeling – approval? Pride? – he is even more evasive. “We’re sorry, these are things that we can’t talk about…”

For Beijing, confronted by this unexpected form of protest – as unique as it is radical – the Tibetans who have self-immolated are simply “terrorists” manipulated by foreigners. The care they take not to hurt anyone else is irrelevant. Their relatives all risk being charged as accomplices. The Tibetan regions of Sichuan province are run by authoritarian politicians who continue to use oppressive methods which hark back to the times of the Cultural Revolution. Here, anyone who survives after self-immolating is treated like a criminal. Half of all the immolations have taken place in Aba, a city of 20,000 inhabitants towards the west of Sichuan province. Every case is followed by arrests, which leads to further immolations in protest. It’s a vicious cycle, which forecasts a very bleak future.

A culture eradicated

The same black cloud hangs over Tongde, a town 200km southwest of Rebkong, where on March 16 the police reacted to a demonstration of about a thousand people by throwing grenades into the middle of the crowd. It is impossible to find out any more details, but according to a young monk from in a nearby monastery, there were several wounded. “We also protested here. What do we want? Freedom. We are not free. We cannot practice our religion freely. We cannot meet our spiritual leader. We cannot study our language in schools, where more and more classes are taught in Mandarin. We cannot even set fire to ourselves without putting our family or monastery in danger…” The young man fears that the province of Qinghai will implement repressive policies that have been tried and tested elsewhere in the Tibetan regions. “In Lhasa, a monastery cannot have more than 30 monks, whereas there were thousands of us in the past! They want to slowly kill off the monastery system which is the pillar of our existence…”

In Rebkong, where the Party Secretary takes a more flexible approach based on dialogue with the head lamas, they have managed to avoid an explosion of violence following the two recent sacrifices, despite the wave of emotion they provoked. “It’s true, things are less violent here,” says a teacher. “But look at what is happening: the Tibetan language is being crushed in our own schools, we are drowning in Chinese immigrants. They have basically decided to eradicate our population. This is why Tibetans have started setting fire to themselves.”

Faced with an ever-growing number of willing martyrs, Beijing wants to smother the revolt by imposing an information blackout. The Party has sealed off the Tibetan regions, four times bigger than France and spread over four provinces, from the rest of China. To intercept foreign journalists, a string of roadblocks has been set-up – hundreds of metres before you even reach the affected areas. The Chinese press is required to use the dispatches from the official government press agency. There is no Internet access on the Tibetan plateau and mobile phones are tapped. When you talk to a Tibetan, he doesn’t just turn off his phone, he takes out the battery as well…

Peaceful protests

Tibet is being crushed under an unofficial martial law. In Sichuan province, four to six times more money is spent on maintaining law and order in the Tibetan regions than in the rest of the province. The number of soldiers sent to the region is skyrocketing, leading some to predict an armed repression. But nothing seems able to stop the spread of these self-sacrificing tendencies. “I am convinced that the movement will continue, and even spread to other groups: teachers, civil servants…” predicts Tashi (not his real name), a writer who lives in Xining, the capital of Qinghai province. “It is the only form of protest that we have left: we cannot demonstrate, or sing, or write, or debate in forums… 70 intellectuals and artists are in prison.” The immolations are therefore to be understood, not as acts of desperation, but on the contrary, as acts of combat. “Since the uprising in 2008, Tibetans have understood that freedom has a price, and that it won’t just be given to us for free,” adds Tashi. In that case, why not an open revolt? “Because of the Dalai Lama. Above all else, people want him back. How could they use methods which he disapproves of?”

When will all this bloodshed end? Tashi darkens: “At the start we said: after 15, the UN will intervene. Then we said 20. Now we are at 30, and nothing is happening… Now people speak of 2,000 sacrifices,” he says with a shiver, “a figure which we pretend to have gotten from Gandhi’s fight against the English…”

Despite the worsening of the situation, the Tibetans seem surprisingly optimistic. “Of course we are!” says Tashi passionately. “I must admit that for a long time I thought that we didn’t have a chance against China… And then there was the uprising in 2008 and the world realized that we are an extraordinary people, ready to die for freedom, for justice. All these martyrs are our heroes and they give us extraordinary strength. I am convinced that in the end we will win, because moral force always wins out against physical force eventually.”