Avec ses films, ses séries et sa K-pop, la petite Corée du Sud est devenue un géant du divertissement

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Hier encore, elle était une « crevette coincée entre deux baleines », la Chine et le Japon, qui l’ont tour à tour colonisée. Avec ses 50 millions d’habitants, la Corée du Sud a réussi en quelques décennies à se hisser parmi les pays les plus riches (15e rang mondial) et au sein du club des détenteurs de soft power (rayonnement culturel).

C’est en effet un tsunami – baptisé Hallyu (« vague coréenne ») par la presse chinoise – qui envahit des contrées de plus en plus éloignées.

Tout commence au tournant du siècle par le triomphe des séries télé made in Séoul. Face aux séries américaines, perçues comme trop cyniques et violentes, les soap coréens empreints de confucianisme plaisent aussi bien aux Japonais sophistiqués qu’aux classes moyennes roumaines, tunisiennes, brésiliennes… Bon marché, ces feuilletons offrent une qualité bien supérieure aux telenovelas ou aux productions locales.

Au milieu des années 2000, une seconde vague planétaire surgit, encore plus puissante : la K-pop. Ce n’est pas le premier mouvement de musique populaire asiatique, la K-pop succède à la J-pop (pop japonaise) et à la pop taïwanaise, mais, étant née sous le signe des réseaux sociaux et YouTube, elle a suscité un engouement planétaire. Les chiffres des exportations de la K-pop sont astronomiques : 3,4 milliards de dollars pour le seul premier semestre de 2012… Même aux États-Unis, une frange significative des ados est fan des Super Boys et autres Girls’ Generation au look asiatique ravageur.

Ce succès doit tout à ce que l’on appelle à Séoul la « technologie culturelle ». Une poignée de producteurs, eux-mêmes anciens chanteurs, ont mis au point un système élaboré de sélection, de formation et même de formatage (y compris par la chirurgie esthétique) des futures « idoles », contrôlant de A à Z la production de chansons, de clips, de tournées, d’émissions télé, etc. Chaque détail est peaufiné et adapté aux goûts du public visé. C’est sans doute ce côté trop léché, trop « trafiqué », qui convainc moins le public occidental. Et c’est probablement pourquoi ce n’est pas une jeune « idole » fabriquée par l’usine à stars de Séoul, mais Psy, un rappeur replet de 34 ans, farceur, rebelle, un poil grossier mais tellement plus authentique, qui a conquis le monde. Avec son hilarant « Gangnam Style », il a recueilli 1,7 milliard de clics sur YouTube. Record mondial !


Parution Le Nouvel Observateur 12 septembre 2013. — N° 2549